Peine perdue (épisode 1)

("Casse toi alors, pauvre con"
And the Oscar goes to ....)
Le week-end (il y a 15 jours) avait pourtant bien commencé puisqu'il avait débuté jeudi. Et surtout je crois que je l'avais bien mérité, après 5 journées à trimer ici et là.
Remis en jambe par un jogging et par une séance de natation, le point d'orgue du week end devait être la soirée des Crazyvores du samedi soir. Mais moi j'attendais le dimanche soir, chose rare.
Les "Crazy" furent les "crazy", nous y allâmes comme prévu, nous buvâmes et nous rentrâmes, rien d'exceptionnel en somme, tout le monde était là, même nous, notre présence n'en fut que plus accessoire. Ce fut néanmoins une bonne soirée, juste assez arrosée, juste conviviale comme il faut, en fait le dîner de pré-soirée avait à lui seul suffit au succès globale d'un samedi parmis tant d'autres.
Mais ce dimanche soir, j'avais ce fameux 2e Rdv et sur le papier tout pour plaire: dîner à deux, canapé et Dvd, chez lui.
Si j'étais si excité intérieurement c'est pour des raisons bien basiques, un peu triviales. Voilà que depuis bien longtemps aucun garçon digne de ce nom ne m'avait pour le moins intrigué de la sorte. Je me trouvais devant un cas d'espèce, une douce beauté, un sourire évocateur, une discussion intéressante, cohérente et construite, aucune concession à la facilité, et même pas de sexe au premier Rdv (ça aurait dû m'intriguer davantage!!).
En plus de tout ça, ce charmant jeune homme m'invite (sans précipitaion tout de même) pour ce qui semblait être un deuxième rdv, un peu plus galant.
C'est donc le coeur et le pas bien plus léger que mon estomac alourdi du week end que j'entrepris de me rendre à cette dernière soirée d'un joli week end.
Jusque là tout va bien, malgré un léger retard de ma part (ce qui ne m'arrive jamais), le dîner valait à lui seul le déplacement, le moment dévédé aussi... et puis rien.
RIEN, un mot que j'ai déjà souvent utilisé sur ce blog, dans des contextes similaires, je me demande si tout ça ne devient pas quelque peu redondant à force.
Rien d'autre donc que ce que j'avais projeté d'y mettre. J'avais baissé la garde là où je m'étais promis de ne plus m'y laisser prendre, j'avais laissé vagabonder une idée très hypothétique, et bien pire je l'avais enjolivée.
Pourquoi?
Peut-être parce que pour une fois j'avais en face de moi quelqu'un qui me donnait envie d'envisager ces choses ô combien extravagantes, il présentait tout ce que j'attendais d'un mec dans ce contexte là, et m'avait simplement donné envie d'essayer à nouveau.
Autre hypothèse, je retombais bêtement dans l'auto-apitoiement et la facilité, en oubliant que chez moi, vivre quelque chose avec quelqu'un est souvent une stratégie d'évitement et d'échec, en tentant de se complaire dans un semblant de vie à deux, parce que les questions que le couple suscite nous aide à ne surtout pas ébranler notre équilibre foireux et névrotique. Lorsque tout est ramené au couple, il n'y a plus de raison de s'échiner à trouver des réponses aux vraies questions, celle qui concernent l'individu, celles qui nous freinent ou nous font avancer parfois, les vraie questions sur l'existance...Celle qui font mal au cul!
Ce qui devait arrivait, n'arriva donc pas et je repartais après minuit, rebroussant chemin Ligne 13 puis ligne 2, toujours le même regard, fixe et vide, cherchant à recoller mentalement les morceaux de la scène qui venait d'être jouée. C'est marrant comme le métro a quelque chose d'à la fois pathétique et très cinématographique, presque romantique quand on l'observe avec du recul.
J'étais plutôt mal, c'est comme si mes couilles avaient migré entre mes amygdales, à chaque tressautement du train, une douleur insidieuse et cynique migrait jusqu'au cerveau.
Qu'as tu Dragi? Tristesse, déception, colère, dégoût de toi même et des autres, mépris voir condescendance pour toutes ces histoires, certainement pas, personne n'y croira, surtout pas moi. Je n'ai rein de tout ça, juste un mélange de tout à la fois, c'est confus, flou, et en même temps limpide, ce que j'ai c'est le vide. Que du vide partout autour et dedans!
Ce vide immense où l'on peut tout mettre et de préférences ses actes manqués, son amertume et tous les autres sentiments péjoratifs de ce monde.... On peut tout y mettre, c'est un grand bordel cette boule, mais lorsqu'on y a tout mis, elle est pleine et tout est vide autour de nous, et le vide dans ma conception des choses revêt une certaine sérénité.
Plénitude/Vide, dualité magique, mystique, qui s'adapte à tout, au sexe, aux considérations de l'intellect et jusqu'à notre environnement, et ce putain d'Univers.
Putain, parfois j'ai l'impression de porter des robes et de venir d'Uranus. Et voilà ce qui se passe dans ma boite crânienne ce dimanche soir après minuit.
Dehors, les sols étaient humides, mais pas assez glissant...sous m'a lèvre inférieure, celle que je mordille quand je me sens plus fragile, on pouvait revoir ma virgule, cette tache de ponctuation, parfois absente et parfois brillante, ses apparitions et disparitions signe le climat de mes émotions comme un baromètre intérieur du pire et du meilleur.
Dans le métro, rien de bouge, ni un bras, ni une épaule, ni une jambe, ni un oeil, juste le cerveau qui analyse une courte histoire sans grande importance.
"Peine perdu, je suis perdu, peine perdue...."
Rien à reprocher à personne, même pas à ce garçon; il se pose peut-être les mêmes questions que moi, mais nous ne les poserons pas ensemble....
Entre Anvers et Pigale, le coup de grâce, cette chanson aussi belle qu'ironiquement appropriée de Jeanne Balibar, le titre est parfait: "Cinema".... Enjoy yourself!
Jeanne Balibar : Cinema
Se sentir minable, fin de l'état de grâce comme un après midi au salon de l'agriculture, goût amer, bouche séchée par le vin blanc, j'ai pensé prendre un chewing gum, puis finalement entre Anvers et Pigale alors que la Jeanne proférait sa sentence, je décidais d'attendre jusqu'à chez moi, de garder ce mauvais goût jusqu'au bout, le goût de la vie, parfois dégueulasse.